Concepts et savoirs de base en santé publique - Disciplines concourantes

Introduction

Le terme "Droit" désigne un ensemble de règles générales, abstraites et impersonnelles qui régissent les comportements des individus dans une société donnée et qui sont sanctionnées par l'autorité publique.

Ainsi, la règle de droit s'applique aux comportements des personnes physiques et morales et également régit les activités des personnes comme l'activité de soin et partant, le domaine de la santé.

Trois éléments sont à retenir en préambule sur la définition du Droit :

• Des règles générales, abstraites et impersonnelles

Les règles de droit sont formulées de manière générale dans la mesure où elles ont vocation à s'appliquer à tous, ou à un ensemble de personnes déterminées (comme le droit de la santé qui s'applique aux professionnels de santé). La règle de droit ne peut régir chaque comportement individuel, chaque spécificité, même si le Législateur s'efforce de les prévoir. La création de la règle de droit obéit de surcroît à un impératif d'intelligibilité et de clarté afin que le droit soit clair et accessible à tous les citoyens. L'adage juridique le rappelle d'ailleurs : "nul n'est censé ignorer la loi".

• Un ensemble de règles

Lorsque l'on évoque la notion de "Droit" au sens large, l'acception renvoie à l'ensemble des sources du droit, c'est-à-dire aux diverses normes qui créent le droit, au sens de règles impératives.

Ces sources du droit sont hiérarchisées et l'image la plus explicite est celle d'une pyramide dans laquelle chaque norme inférieure doit être conforme à la norme supérieure, sans quoi elle est écartée. Le sommet de la pyramide représente la norme suprême, unique par essence, et la base de la pyramide représente le type de norme le plus faible mais dont le volume est le plus important.

Chacune de ces normes crée du Droit en ce sens que les individus peuvent, à l'occasion d'un procès, faire valoir les principes et dispositions normatives qu'elles édictent.

Du sommet à la base, nous retrouvons :

- la Constitution : il s'agit de la norme suprême et toutes les sources inférieures doivent lui être conformes. Il s'agit non seulement du texte initial de 1958 de la Constitution de la Vème République (http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/la-constitution/la-constitution-du-4-octobre-1958/texte-integral-de-la-constitution-de-1958.5074.html) mais également de divers éléments dénommés "bloc de constitutionalité" et qui ont également valeur constitutionnelle. A titre d'exemple, on y retrouve : la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, le préambule de la Constitution de 1946, le principe de précaution de 1995, ou encore l'interdiction de la peine de mort de 1981.

- les traités internationaux : il s'agit des traités signés et ratifiés par la France, qu'ils soient bilatéraux (signés par deux pays) ou multilatéraux. Nous retrouvons également dans cette catégorie, le droit de l'Union européenne au rang duquel figure le droit originel, à savoir les traités constitutifs de l'Union, mais également le droit dérivé, c'est à dire les mesures prises par les organes de l'Union : directives et règlements communautaires.

- la loi : c'est la source de droit la plus connue, issue du travail du Parlement, à savoir de l'Assemblée nationale et du Sénat. Dans plusieurs Codes - au sens recueils des textes normatifs - où figurent à la fois des dispositions légales et des dispositions réglementaires, les articles issus de la loi sont précédés de la lettre L. Tel est notamment le cas du Code de la santé publique (CSP) (http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do?cidTexte=LEGITEXT000006072665&dateTexte=20120721) où les articles précédés de la lettre L. ont pour sources la loi et ont donc une valeur légale, à savoir inférieure aux Traités internationaux et à la Constitution mais supérieure aux actes réglementaires, lesquels figurent dans les Codes avec la lettre R. ou D.

- les normes réglementaires : il s'agit des règles de droit créées par le pouvoir réglementaire, à savoir le Gouvernement, et qui se divisent en deux et sont hiérarchisées selon leur auteur. D'abord les décrets, qui peuvent être pris par le Président de la République, le Premier ministre, plusieurs ministres (décret interministériel) ou un seul ministre. Ensuite, les arrêtés, d'une force normative inférieure, et qui sont pris par les Préfets ou les Maires.

Schéma

Hors hiérarchie :

- Circulaire

- Jurisprudence

- Questions parlementaires

- Règlement intérieur

Ces éléments hors hiérarchie ne sont pas des sources créatrices du Droit mais des sources interprétatives dans la mesure où ils ne peuvent être invoqués seuls au soutien d'une action en justice. Ces sources interprétatives du droit permettent de passer de la règle de droit générale et impersonnelle à une application concrète pour des situations particulières.

• Régissant le comportement des individus

La règle de droit se caractérise enfin par son caractère coercitif, à savoir que sa méconnaissance est sanctionnée par l'autorité publique (sanctions pénales, sanctions civiles, annulation d'actes juridiques, paiement de dommages et intérêts).

Ainsi, le non-respect du droit est générateur de responsabilité, laquelle change de nature juridique selon les cas. Nous pouvons établir quatre types de responsabilité que l'on peut regrouper en deux catégories.

D'une part, la responsabilité dite "sanction" : la méconnaissance de la règle de droit conduit à une sanction personnelle à l'encontre de l'individu. Il s'agit certes de la responsabilité pénale avec les peines pénales mais également de la responsabilité disciplinaire qui pourra conduire au prononcé de diverses sanctions disciplinaires et notamment la radiation. Ainsi, le Conseil d'Etat valide la décision de radiation d'un médecin prise par la chambre disciplinaire nationale au motif que le professionnel de santé avait prodigué des soins illusoires au patient. Le Conseil relève dans son arrêt que le médecin a " par son comportement répété, conforté sa patiente dans le déni du cancer dont elle était atteinte, en se limitant à lui prodiguer des traitements illusoires, tout en omettant de l'informer sur la gravité de son état et de l'inciter à sa tourner vers des soins spécialisés" ; ce qui justifie pleinement sa radiation du tableau. (Conseil d'Etat, 30 mai 2011, requête n° 339496 : http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000024154045&fastReqId=1195529438&fastPos=1).

D'autre part, la responsabilité dite "indemnisation" : ici la question n'est plus celle de la sanction au sens punition d'un comportement blâmable, mais celle de la réparation d'un dommage causé, volontairement ou involontairement, par l'attribution de dommages et intérêts. On parle alors de responsabilité civile ou de responsabilité administrative selon le cadre de l'activité, et notamment de l'activité de soin. Ainsi, si le soin est dispensé à titre libéral ou dans le secteur privé - clinique - la responsabilité est civile et le procès se déroule au Tribunal de Grande Instance. En revanche, si l'acte est réalisé dans le cadre d'un centre hospitalier public, la responsabilité est administrative et l'action est exercée devant le Tribunal administratif.

• L'application du Droit au domaine de la santé

Dans la mesure où le droit régit les activités humaines et les personnes, il a vocation à s'appliquer (et à encadrer) à l'activité de soin au sens large, y compris les politiques de santé publique.

Le droit et le domaine de la santé ont pour point commun qu'ils évoluent vite. Le droit doit ainsi sans cesse encadrer les nouveautés médicales, qu'il s'agisse de nouveaux médicaments, de nouvelles techniques opératoires, ou de nouvelles possibilités médicales comme la procréation médicalement assistée. La diversité de l'activité médicale appelle la diversité des règles de droit qui l'encadre. L'essentiel des règles relatives à la santé se retrouvent aujourd'hui dans le CSP.

La santé est une préoccupation importante dans nos sociétés modernes et tend même à devenir une revendication des citoyens voire un acquis à protéger. Ces deux courants, l'un objectif et collectif, l'autre subjectif et individuel, reflètent la différence entre le droit de la santé et le droit à la santé Le courant objectif renvoie à des considérations de santé publique dont la finalité est la préservation de la santé des populations justifiant ainsi des mesures prophylactiques telles que les vaccinations obligatoires. En revanche, le courant subjectif renvoie aux droits de chaque personne prise dans sa singularité en matière de santé : droit à l'information, droit au secret, respect du consentement.

Le droit de la santé regroupe l'ensemble des règles juridiques qui régissent le domaine sanitaire, c'est-à-dire non seulement les soins, mais aussi le système de santé. Le droit à la santé est un droit subjectif que chaque individu pourrait invoquer contre l'État en vertu du préambule de la constitution de 1946, lequel a valeur constitutionnelle, et qui énonce que " la Nation garantit, à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé". De la même façon, la Charte de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) du 27 juillet 1946 rappelle que "la possession du meilleur état de santé qu'il est possible d'atteindre constitue l'un des droits fondamentaux de tout être humain", tout comme l'article 25-1 de la Charte universelle des droits de l'homme dispose que "toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé".

Cependant, l'ensemble de ces textes ne confère pas aux individus un droit à la santé, ce qui équivaudrait à leur reconnaître la possibilité d'intenter des actions à l'encontre de l'État dès lors qu'ils seraient malades. Le droit « créance » ne se retrouve pas en matière de santé ; la loi du 27 juillet 1999 a institué la Couverture maladie universelle (CMU) (http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000198392) avec pour objet de fournir à la population disposant de ressources insuffisantes un accès effectif aux soins. Ce droit n'est que relatif et doit être entendu comme un droit aux soins au sens large, un droit de recevoir des prestations de santé ; et dans ce cadre le système de sécurité sociale français, qui comme les autres mesures relatives à la santé a vu le jour au lendemain de la seconde guerre mondiale, apparaît essentiel.

Les deux courants conduisent également à diviser, sans pour autant les opposer, le droit de la santé publique qui concerne la protection de la santé dans un intérêt général et renvoie aux vaccinations obligatoires, aux mesures de quarantaine ou encore à des campagnes de prévention comme celles relatives à l'alcool ou au tabac, et le droit de la santé privé qui renvoie pour sa part au droit des patients dans la relation de soin.

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