Concepts et savoirs de base en santé publique - Disciplines concourantes

II. Le droit et la santé publique

La santé publique est une discipline qui étudie la santé des populations dans ses composantes, ses déterminants, avec une dimension collective. Le terme "publique" renvoie également à l'intervention des pouvoirs publics dans le domaine de la santé et plus globalement dans le domaine sanitaire. Cette intervention passe inéluctablement par le Droit avec l'édiction de normes et d'obligations qui s'appliquent aux acteurs de la santé, tant soignants que patients.

1) L'action des pouvoirs publics a conduit à l'organisation des professions de santé avec la création des ordres professionnels dotés de prérogatives administratives et disciplinaires qui permet notamment de réguler l'offre de soins au travers de l'instauration de numerus clausus ou d'agrément préfectoral pour l'installation des pharmaciens. Les ordres participent, à titre d'exemple, à l'organisation du service de garde et d'urgence, soit en y étant associés comme pour les médecins – l'organisation de la permanence des soins étant de la compétence de l'Agence régionale de santé (ARS) - soit directement comme pour les pharmaciens - article L. 5125 -1-1 A du CSP.

Les ordres professionnels dans le domaine de la santé sont au nombre de 7 et concernent : les médecins, les chirurgiens-dentistes, les sages femmes, les pharmaciens, les masseurs-kinésithérapeutes, les pédicures-podologues et les infirmiers. Ils répondent tous à une structure pyramidale à plusieurs échelons avec un ordre national qui participe au processus d'édiction de normes déontologiques pour leur profession, un échelon régional et un échelon départemental – à l'exception des pédicures-podologues qui n'ont pas d'échelon départemental.

2) En sus, les pouvoirs publics déterminent également l'organisation des établissements de santé, qu'ils soient publics ou privés ainsi que le système hospitalier. La loi n°2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (loi HPST) (http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000020879475&categorieLien=id), a modifié l'organisation hospitalière française, notamment en transférant aux ARS les compétences des anciennes agences régionales d'hospitalisation (ARS) - qu'elles remplacent - et en les élargissant davantage, confortant ainsi l'ancrage régional des établissements de soins.

Cette loi modifie également l'organisation interne des établissements de santé publics en instaurant un conseil de surveillance - article L. 6143-5 du CSP -, un directoire dont la composition est régie par l'article L. 6142-7-5 du CSP et un directeur évalué par l'ARS et qui définit l'organisation de l'établissement en pôles d'activités conformément au projet médical d'établissement.

Enfin, la loi de 2009 s'inscrit dans un processus de collaboration des établissements de santé publics et privés afin de mieux maitriser les dépenses de santé et de redéployer les moyens. La loi HPST met ainsi fin à la planification du système hospitalier au profit de la coordination du système de santé, intégrant le système hospitalier, dont la direction est confiée au directeur de l'ARS et notamment à travers la détermination du schéma régional d'organisation des soins (SROS).

La collaboration peut alors être fonctionnelle et passe par les missions de service public assurées par les établissements de santé – permanence des soins, prise en charge des soins palliatifs, actions de santé publique, soins dispensés aux détenus, etc. –, par la dévolution des missions de service public à des établissements de santé publics ou privés, ou encore par la création d'établissements de santé privés d'intérêt collectif tels que les centres de lutte contre le cancer ou les établissements de santé privés gérés par des organismes sans but lucratif.

La collaboration peut aussi être institutionnelle et passera alors par la création de personnes morales ad hoc auxquelles seront dévolues certaines missions. Il s'agit des syndicats inter-hospitaliers ou encore des groupements de coopération sanitaire (GCS) et des groupements d'intérêt public (GIP).

3) L'action des pouvoirs publics dans le domaine de la santé passe inéluctablement par la détermination des politiques de santé où s'entremêlent les données juridiques, économiques, politiques et sociales.

L'article L. 1411-1 du CSP précise que la détermination de la politique nationale de santé est de la compétence de l'Etat. Ce principe doit aujourd'hui être relativisé eu égard aux efforts de territorialisation de la politique de santé autour de l'ARS en collaboration avec les collectivités territoriales, le préfet de région et l'assurance maladie. Ainsi, l'article L. 1434-16 du Code de la santé publique précise que "l'agence régionale de santé définit les territoires de santé pertinents pour les activités de santé publique, de soin et d'équipement des établissements de santé, de prise en charge et d'accompagnement médico-social ainsi que l'accès aux soins de premier recours".

En cela, l'ARS est tenue de gérer la politique d'organisation territoriale des soins, ce qui passe notamment par la détermination d'un SROS, principal instrument de la politique d'organisation des soins. L'article L. 1434-7 du CSP dispose que "le schéma régional d'organisation des soins a pour objet de prévoir et de susciter l'évolution nécessaire de l'offre de soins afin de répondre aux besoins de santé de la population et aux exigences d'efficacité et d'accessibilité géographique. Il précise les adaptations et les complémentarités de l'offre de soins, ainsi que les coopérations entre les établissements de santé [...]. Il prend en compte également les difficultés de déplacement des populations".

En sus du SROS, il convient de préciser que divers soins font l'objet d'une organisation particulière qui intensifie la pression des pouvoirs publics sur les professionnels et établissements de santé. Il s'agit des soins de premier recours –article L. 1411-11 du CSP -, la permanence des soins, les soins d'urgence - article L. 6311-2 du CSP -, et les soins à domicile – article R. 6124-301 du CSP.

4) Les pouvoirs publics mettent en place des politiques de prévention dans un but de prophylaxie sociale et guidées aujourd'hui par la sécurité sanitaire et le principe de précaution. Cette politique de santé publique prend parfois la forme de mesures de police administrative avec des mesures contraignantes comme les déclarations obligatoires de l'article L. 3113-1 du CSP, les examens prénataux et postnataux obligatoires - article L. 2122-1 du CSP -, ou encore les vaccinations obligatoires.

Plus globalement, l'action des pouvoirs publics dans le champ de la santé publique passera par la lutte contre des maladies et des dépendances bien ciblées comme la lutte contre les maladies mentales récemment modifiée, la lutte contre l'alcoolisme - article L. 3311-1 du CSP -, contre la toxicomanie, contre le tabagisme ou encore contre le SIDA – article L. 3121-1 du CSP.

Enfin, les autorités sanitaires veillent à lutter contre la propagation internationale des maladies avec un contrôle sanitaire aux frontières et un travail en interaction avec les organisations internationales et notamment l'OMS.

ConseilBibliographie conseillée

• Didier TRUCHET, Droit de la santé publique, mémento Dalloz, 7ème édition, 2009.

• Aquilino MORELLE et Didier TABUTEAU, La santé publique, PUF, coll « Que sais-je », 2010.

• Anne LAUDE, Bertrand MATHIEU et Didier TABUTEAU, Droit de la santé, 2ème édition, 2009.

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