Raisons pragmatiques
Différentes raisons sont avancées pour expliquer l'augmentation des dépenses de santé dans les pays industrialisés :
les changements de pratiques :
Les changements de pratiques expliqueraient près de 58% de la hausse des dépenses de santé (Brigitte Dormont Health Economics 2003). Ces changements comprennent tout d'abord le développement des technologies diagnostiques et thérapeutiques entraînant l'hyperspécialisation des professions des santé,
Dans le domaine du médicament par exemple, il a été montré que les médicaments de spécialités constituaient le principal moteur de la croissance
Une analyse menée par l'Assurance Maladie sur l'année 2007 montre d'ailleurs que la croissance des dépenses de médicaments est principalement liée aux médicaments dits de spécialités, prescrits dans le cadre de pathologies lourdes engageant le pronostic vital (cancers, sclérose en plaques, sida, polyarthrite rhumatoïde, etc.). Ils représentaient ainsi 56% de la croissance totale enregistrée sur l'année 2007, soit une hausse annuelle des dépenses de 11% par rapport à 2006. La raison tient notamment à ce que ces médicaments, très efficaces, affichent souvent des prix élevés.
Mais les changements de pratique peuvent également référence à la modification du comportement des offreurs et des patients.
l'accès facile et/ou facilité à une information médicale abondante qui induit l'autonomisation de consommateurs devenus de plus en plus exigeants.
Une caractéristique française est le fait que les consultations se finissent quasi systématiquement par des ordonnances. Il a ainsi été montré par Amar E et Pereira C en 2005 (« Les prescriptions des médecins généralistes et leurs déterminants », DREES : Études et Résultats n°440) que :
78% des consultations donnaient lieu à une prescription de médicaments pour un diagnostic de maladie cardio-vasculaire ou de pathologie chronique ;
si plusieurs médicament étaient prescrits au cours de la consultation, plusieurs classes thérapeutiques étaient généralement impliquées (dans 84 % des cas) ;
L'étude a également montré que la nature des pathologies et le degré de certitude du diagnostic jouaient logiquement un rôle majeur sur le volume des prescriptions. Cependant, au delà de des facteurs, d'autres éléments liés à la relation entre le médecin et le patient pourraient expliquer l'accès accru au système de soins (voir le paragraphe suivant "Raisons théoriques")
l'augmentation de l'espérance de vie qui se traduit par un vieillissement de la population, de plus en plus demandeuse de soins avec l'augmentation de la fréquence des pathologies coûteuses (démences, maladies chroniques...). Les personnes âgées consomment environ quatre fois plus de soins de santé que les autres. Il a également été montré qu'une grande partie des dépenses de santé était consacrée à des patients dans leur dernière année d'existence. Le coût des soins augmente donc de manière spectaculaire à l'approche de la mort, quel que soit l'âge auquel le décès se produit. Les 5% d'assurés qui décèdent dans l'année représentent environ 30% des dépenses couvertes, Ce n'est donc pas l'âge mais la proximité du décès qui explique les dépenses de soins.
Mais contrairement à ce que l'on peut penser, l'impact du vieillissement est limité et ne permet pas en fait d'expliquer qu'une petite partie de l'accroissement des dépenses de santé. Ainsi, dans le cas de la France, Brigitte Dormont (Health Economics 2006) explique-t-elle que seul 3 % de hausse des dépenses de santé entre 1992 et 2000 est expliquée par la contribution du vieillissement.
l'évolution de la morbidité On considère que l'accroissement de la morbidité, illustrée par l'augmentation de pathologies chroniques et coûteuses, pourrait expliquer jusqu'à 10% de l'augmentation des dépenses de santé (B Dormont 2006).
la gratuité des soins pour tous : l'objectif du mécanisme de protection sociale en France, comme dans d'autres pays, est de ne pas gêner le malade dans son accès et sa demande aux soins. Par ailleurs, l'assurance complémentaire s'est beaucoup développée en France, du fait de la demande de la part de la population d'une indemnisation totale et complète du risque maladie. L'indemnisation des frais médicaux qui n'étaient pas pris en compte par l'assurance principale maladie est ainsi devenue possible, favorisant sensiblement le recours à la consommation.
le mode de rémunération des médecins ( voir le chapitre 2)
