Micro-économie ou l'économie appliquée
L'article princeps d'Arrow Cf Who 2004.82(2). http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2585909/ est à l'origine de la microéconomie de la santé, avec son analyse du comportement rationnel des consommateurs de soins.
Comme nous l'avons vu, la science économique s'intéresse avant toute chose à l'interaction entre les individus sur un ou plusieurs marchés. Elle peut se focaliser sur un ensemble ou alors analyser l'individu à la « loupe ». Ce qui nous intéresse c'est le choix d'un individu mis dans des conditions particulières. On l'étudie et on le modélise.
Cet individu ou agent économique peut être, soit un médecin, pharmacien, infirmière, patient, ou une institution de santé, assureur public et privé, et compagnie pharmaceutique, qui ont tous des incitations économiques ou autres. Ils sont attirés par un but, qu'il soit commun ou non. On cherche alors à déterminer la rationalité des agents dans le système de santé, et l'impact sur le marché des soins qui en résulte.
C'est l'enjeu de la microéconomie en santé : identifier les agents, analyser leurs comportements et l'impact décisionnel sur l'offre et la demande. Les outils traditionnels de la modélisation économique sont appliqués dans le domaine de la santé, bien que certaines limites viennent s'immiscer dans cette analyse. Les outils traditionnels de la modélisation microéconomique sont ainsi mobilisés dans le champ de la santé pour produire des prédictions, ensuite confrontées à la réalité par les méthodes économétriques habituelles.
Dans les sociétés modernes les choix des agents, et en particulier les patients, ont une place primordiale. Une modélisation autour du patient permet de déterminer l'offre de soins en fonction de l'état de santé de l'individu. On prédit alors que la demande de soins augmente avec la détérioration de santé de l'individu et ainsi le fait d'introduire des programmes de dépistage permet d'éviter des coûts et réaliser des économies.
Ce travail de modélisation ne peut évidemment pas se faire par un économiste « isolé », il faut alors mixer la théorie économique avec les données cliniques et épidémiologiques afin de mieux comprendre le rationnel des patients. La prise en compte des éléments de santé répond également à la nécessité de l'éthique dans le raisonnement. La question de l'efficience économique intègre l'éthique au sens médical du terme.
Le point de vue microéconomique nous conduit naturellement à évoquer le calcul économique appliqué à la santé.
Le calcul économique désigne l'ensemble des techniques permettant à un agent économique rationnel d'optimiser ses décisions dans un monde ou diverses options lui sont ouvertes. Il s'agit de calculer l'investissement ou le tarif qui, par ses conséquences ou ses effets, maximise l'intérêt du décideur sous différentes contraintes (économiques ou réglementaire). Dans le domaine de la santé, le calcul économique est une boîte à outils d'aide à la décision, mobilisables pour éclairer les choix entre plusieurs programmes concurrents.
Ces programmes sont analysées en termes d'efficience, puisqu'il s'agit de rapprocher leurs conséquences et leurs coûts qui s'étendent généralement sur plusieurs périodes de temps.
Cependant, si l'estimation des coûts en termes monétaires repose sur une méthodologie commune et des outils classiques (comptabilité privée, actualisation des coûts, raisonnement en coût marginal,...), la mesure des conséquences obéit a une logique différente selon le type d'analyse.
Ces analyses sont couramment appeler analyses coûts-avantages, dont seront évoqués ici les grandes lignes méthodologiques
Les analyses coûts-avantages
Un calcul économique ne peut être clairement effectué sans avoir établi au préalable sa perspective. Quel agent on étudie et à qui s'adresse l'analyse (qui est le décideur final). Par exemple, si on veut analyser les conséquences d'un programme national de prévention sur les comportements des agents, il est évident que les conclusions de l'analyse sont adressées directement au financeur public (l'État). Le calcul se fera alors, notamment en ce qui concerne la prise en compte des coûts, de façon à permettre une décision au financeur.
Le choix de l'expression des conséquences a également son importance. La méthode économique varie selon le critère retenu pour exprimer les conséquences (ou avantages) d'un programme de santé ou de l'introduction d'un nouveau traitement.
En complément :
Les analyses coût-bénéfice
Cette méthode d'analyse est celle qui est couramment utilisées par les économistes dans les différents domaines (autres que la santé). Le principe consiste à monétariser les coûts et les bénéfices résultant d'un programme de santé de façon à donner un résultat net (positif ou négatif).
Dans le domaine de la santé, ce type d'analyse est difficile a mené car son application nécessite d'exprimer dans des valeurs monétaires les effets de santé comme la diminution de la mortalité infantile ou amélioration de la survie chez des patients atteints d'un cancer et la raison pour laquelle elle n'est quasiment pas utilisée. De ce fait elle est très peu utilisée dans ce domaine.
Les analyses coût-efficacité
Contrairement à la précédente méthode, celle-ci s'appuie sur des connaissances cliniques ou épidémiologiques pour exprimer le bénéfice perçu. Les coûts sont bien monétarisés alors que les conséquences restent en unité « naturelle » (années de vie sauvées, cas évités,...).
Cette unité qui exprime l'efficacité doit être signifiante du point de vue clinique, les professionnels de santé et même le grand public. De même que pour les coûts, l'efficacité doit s'exprimer de façon unidimensionnelle. Si plusieurs dimensions d'un état de santé sont prises en compte, alors celles-ci doivent être synthétisées dans une dimension unique et principale à opposer aux coûts.
Les unités des coûts et des bénéfices étant discordantes, on ne peut dégager de solde bénéficiaire ou déficitaire comme pour la méthode précédente. On calcule en revanche un ratio coût-efficacité pouvant exprimer par exemple « les coûts par vie sauvée » (si l'indicateur d'efficacité est la mortalité) ou « les coûts par année de vie sauvée » (si l'indicateur est l'espérance de vie). Devant un choix multiple, le décideur choisira en premier l'option qui donne le plus petit coût pour la plus grande efficacité. Cette procédure garantie que pour un budget donné, le décideur obtiendra la plus grande quantité possible d'effets de santé.
Les analyses coût-utilité
Elles sont une variante de la méthode précédente, avec pour particularité d'intégrer le point de vu du patient par une mesure d'utilité. En économie de la santé, l'utilité est une mesure de la préférence d'un individu et exprime le bien-être qu'il peut obtenir de la consommation d'un bien ou service. Cette mesure d'utilité est intégrée directement par la théorie économique dans laquelle, la fonction d'utilité permet d'exprimer le choix des individus en matière de consommation de biens et services.
L'avantage de cette méthode réside dans la capacité d'intégrer les préférences de l'individu dans l'analyse décisionnelle.
Nous avons vu ici les principaux types d'études médico-économiques
Cependant l'analyse économique peut donner lieu à un autre type d'étude dont l'objet est plus limité car ne portant que sur les coûts : les études de minimisation des coûts. Celles-ci sont des études de type coût-efficacité amputé de leur bras efficacité (efficacité étant similaire entre stratégie). Par exemple le choix de différentes techniques chirurgicale donnant le même résultat : l'option la moins coûteuse est alors nécessairement la plus coût-efficace.