Introduction
Pendant longtemps, les médecins et les soignants n'ont pas envisagé que les patients ne suivent pas leurs prescriptions médicales et leurs recommandations. Dans les années 70, la constatation du phénomène de non-observance a été interprétée comme le résultat direct de la personnalité du patient sans prise en compte de la compréhension ou non par le patient de la mise en place du traitement, ni d'autres facteurs associés. Les premières recherches ne sont pas parvenues à identifier des caractéristiques de personnalité qui distingueraient les patients observants des patients non observants (Leventhal et Cameron, 1987). De plus, la compréhension par le patient de l'enjeu d'un traitement a très vite été identifiée comme n'étant pas le seul facteur influant sur l'observance : en effet, les comportements d'observance n'étaient pas meilleurs parmi des patients, eux-mêmes médecins, que parmi des patients classiques (Blackwell, 1973). Durant les trente dernières années, la notion d'observance thérapeutique a évolué ainsi que les moyens d'investigations qui lui sont liés. Lorsque l'ordonnance prescrite par le médecin est apparue (comme son nom l'indique bien), le patient devait se soumet aux prescriptions et aux dires du médecin ainsi la prise de médicaments, le suivi du régime ou le changement d'habitudes de vie d'une personne devaient coïncider avec les conseils médicaux ou de santé (Haynes et coll, 1976). Dans ce contexte, le patient est placé dans une passivité manifeste. L'observance thérapeutique reste proche de cette description, elle désigne le degré avec lequel un patient suit les prescriptions et vient aux rendez-vous médicaux fixés, le degré de respect des recommandations concernant régime alimentaire, exercice physique, la non consommation d'alcool et de tabac. L'étude de l'observance thérapeutique ne peut pas se réduire à l'étude de la non-conformité des patients car celle-ci n'est pas indépendante de facteurs contextuels en particulier familiaux (par exemple : faire un régime réduisant les matières grasses dépend principalement de la personne qui réalise les repas). A partir des années 1990, le terme de self-management est employé ; lorsque les équipes soignantes proposent des programmes d'éducation thérapeutique au patient (diabétique, asthmatique) et que celui-ci devient acteur dans la gestion de sa maladie. Actuellement, le phénomène de non-observance est envisagé comme le résultat de plusieurs facteurs liés à la spécificité de la maladie et à son traitement, liés à la relation médecin/patient mais également aux ressources du patient.
Selon de nombreuses études, toutes pathologies confondues, un tiers des patients en moyenne peuvent être considérés comme non-observants. Les mesures de l'observance thérapeutique restent complexes, deux sortes d'évaluations sont préconisées :
les mesures directes réalisées à partir de marqueurs biologiques présents dans l'organisme (par exemple, les lymphocytes CD4+ dans le cas du VIH) ;
les mesures indirectes, plus facilement applicables dans la pratique clinique, sont les auto-questionnaires, l'entretien semi-directif, les techniques de comptage par pilulier avec mémorisation du nombre d'ouverture du boîtier pour la prise de pilules, de la durée d'ouverture, de sa fréquence et de sa régularité (Geletko, Segarra & Mayer, 1996 ; Andrejak, Genes, Vaur, Poncelet, Clerson, et Carre, 2000). Lorsqu'une faible observance ou une non-observance est détectée, ce qui reste essentiel c'est l'étude des facteurs déterminant cette non-observance thérapeutique.