Fixation du prix du médicament
Le principe de fixation du prix du médicament
Le médicament est pris en charge par la Société, ce qui implique un contrôle de Pouvoirs publics pour la fixation de son prix et des conditions de son remboursement. Ceci modifie les règles économiques qui prévalent pour la distribution des autres produits et services.
Pour le médicament remboursable, les prix sont négociés. Il est bien évident que le prix d'un médicament n'est pas uniquement relié à son coût de production, mais intègre les frais considérables de recherche et développement, nécessaires à la mise au point de nouvelles molécules, y compris les échecs. Les prix des médicaments remboursables aux assurés sociaux sont fixés par convention entre l'entreprise et le Comité économique des produits de santé (CEPS)[1].
La prise en charge par l ‘Assurance Maladie et le prix fixé par convention de chaque spécialité mise sur le marché sont des enjeux cruciaux pour le laboratoire pharmaceutique.
Le processus de fixation du prix du médicament
La fixation des prix et de remboursement des médicaments en France est subordonné en France à un processus strict :
La prise en charge ou le remboursement des médicaments est subordonnée à leur inscription sur une liste positive établie et mise à jour par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la Sécurité sociale. Il existe une liste pour les médicaments délivrés dans les établissements de santé (médicaments agréés aux collectivités) et une liste pour les médicaments délivrés en pharmacies d'officine (médicaments remboursables aux assurés sociaux). Un même médicament peut être inscrit sur une seule ou sur les deux listes. L'inscription sur ces listes se fait à la demande du laboratoire exploitant et est accordée pour 5 ans. C'est la Commission de la Transparence[2] qui propose, sous forme d'avis, l'inscription des médicaments remboursables, de même que le taux de remboursement.
L'examen se fait indication par indication. L'avis sur le bien fondé de l'inscription repose sur l'appréciation du service médical rendu[3] (SMR)
La commission de la Transparence apprécie également l'Amélioration du Service Médical Rendu (ASMR[4]) apportée par la spécialité. L'ASMR est appréciée par une évaluation comparative prenant en compte l'efficacité et la tolérance du médicament par rapport aux médicaments jugés comparables. L'ASMR est un des éléments pris en compte par le Comité Économique des Produits de Santé (CEPS) pour la fixation du prix du médicament.
La Commission de la Transparence précise aussi la population cible, c'est à dire l'estimation du nombre de patients relevant des indications thérapeutiques pour lesquelles la Commission estime l'inscription fondée, selon les données épidémiologiques disponibles. Elle apprécie le caractère approprié du conditionnement, au regard de la posologie et de la durée du traitement. Un taux de prise en charge est proposé (article R.322-1du code de la sécurité sociale) :
le taux est de 100% dans le cas d'un traitement indispensable/non substituable et d'une maladie mettant en jeu le pronostic vital
le taux est de 65 % est proposé dans le cas d'un traitement efficace et d'une affection grave
dans les autres cas, le taux sera de 35 %
un nouveau taux de 15% a été créé depuis 2010 pour certains médicaments à SMR faible afin de préparer les médecins et les patients à un futur déremboursement
La fixation des prix : un enjeu crucial pour la maîtrise des dépenses de santé
Le prix de vente au public des médicaments remboursables par la Sécurité sociale est donc fixé par convention entre l'entreprise exploitant le médicament et le comité économique des produits de santé (CEPS).
La fixation du prix d'une spécialité (article L.162-16-4 du code de la sécurité sociale) tient compte principalement de l'amélioration du service médical rendu (ASMR) apportée par le médicament, des prix des médicaments à même visée thérapeutique, des volumes de vente prévus ou constatés ainsi que des conditions prévisibles et réelles d'utilisation de ce médicament, mais aussi sur le volume et les actions de promotion dont la spécialité fait l'objet et sur les économies engendrées par la spécialité dans la pathologie concernée. Le CEPS a donc une double mission : conclure avec les entreprises des conventions relatives au prix des médicaments ainsi qu'à leur évolution et fixer les prix des médicaments donnant lieu à un remboursement.
Le prix des médicaments très innovants, d'ASMR I à III est fixé à un niveau cohérent avec les prix européens (niveau de prix ne doit pas être inférieur au prix le plus bas parmi ceux pratiqués sur les 4 marchés européens comparables, à savoir l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, le Royaume-Uni – accord –cadre 2003-2006).
Cet encadrement des prix se retrouve dans la plupart des pays européens. On peut noter que même les pays qui ont choisi une liberté des prix pour les médicaments remboursables ont mis en place des systèmes de régulation pour encadrer les dépenses (des prix libres, mais un profit contrôlé au Royaume-Uni, un prix de référence en Allemagne, par exemple).
La convention fixe également un volume de ventes médicalement justifiées. La publicité auprès des professionnels de santé est surveillée par un contrôle a posteriori, elle ne doit pas entraîner de surconsommation et doit respecter le bon usage du médicament, en particulier les indications de l'AMM. Le non respect de l'engagement est sanctionnable (volumes de vente supérieurs, par exemple) une révision de prix est alors imposée. Ainsi, contrairement aux autres secteurs d'activité, non seulement le fabricant ne fixe pas réellement son prix mais il est en quelque sorte pénalisé si son chiffre d'affaires augmente par « effet volume ».
Rôle des acteurs du secteur pharmaceutique sur les prix
Pour les grossistes répartiteurs, la marge est fixée par les Pouvoirs publics. C'est une marge dégressive lissée, ce qui signifie que les coefficients de marge sont d'autant plus faibles que les tranches de prix sont élevés.
Les conséquences d'une totale liberté des prix
La liberté des prix existe pour certaines catégories de médicaments :
Pour les médicaments hospitaliers les prix sont négociés par appels d'offres. Le choix de ce canal peut être imposé par les Pouvoirs publics. Ainsi la France a décidé de réserver à l'usage hospitalier certains produits innovants pour continuer à les évaluer. Le marché hospitalier concerne préférentiellement deux types de médicaments : les médicaments innovants pour des pathologies graves pour des raisons de réserve hospitalière de droit ou de fait et les médicaments d'usage courant dont les quantités achetées sont importantes.
Les médicaments vendus aux hôpitaux sont soumis à une réglementation prévue par le Code de la Santé Publique (agrément aux collectivités).
Les pharmaciens hospitaliers, responsables de la gestion et de l'approvisionnement choisissent les médicaments selon des critères scientifiques et économiques en collaboration avec les médecins et les gestionnaires dans le cadre de comités de médicaments. Afin de pouvoir référencer les produits innovants très coûteux, le pharmacien hospitalier essaie d'obtenir des prix pour les médicaments courants, l'enveloppe globale n'étant pas extensible, il doit concilier les exigences de santé publique et les contraintes économiques.
Les médicaments de médication familiale regroupent l'ensemble des spécialités non remboursables, ne nécessitant pas de prescription médicale car concernant des pathologies bénignes. Les médicaments qui ne sont plus remboursés bénéficient d'une liberté des prix.
Le marché de l'automédication est peu dynamique en France.
Il faut reconnaître que les Français ne sont pas habitués à payer leurs médicaments puisqu'ils sont en majorité pris en charge par les organismes de protection sociale et que l'écart de prix est important entre une spécialité remboursable et une spécialité non remboursable, ce qui n'incite pas le patient à prendre en charge les petites pathologies.
Nos partenaires européens ont libéré partiellement ce secteur à l'occasion de la construction du marché unique, sans préjudice pour la santé publique. Actuellement le marché de l'auto-médication progresse en France grâce au développement du libre accès en autorisant le libre accès aux spécialités dans l'espace de vente devant le comptoir. De plus, avec les déremboursements d'un certain nombre de spécialités, les patients vont prendre l'habitude de prendre en charge les médicaments pour certaines pathologies, comme le rhume , la diarrhée, la toux ou la douleur, comme le font déjà leurs voisins européens.
Complément :
Depuis 1987, leurs prix sont libres et les achats par les établissements publics de santé sont régis par le Code des Marchés Publics. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2004 a confié au CEPS le soin de fixer le prix auquel les établissements de santé peuvent vendre des médicaments aux patients en ambulatoire dans le cadre de la rétrocession. Il s'agit de médicaments, réservés à l'usage hospitalier, qui sont prescrits par les médecins de l'hôpital aux malades qu'ils suivent à l'issue d'une hospitalisation ou en consultation et que le malade achète à la pharmacie de l'hôpital. La mise en œuvre de la tarification à l'activité (T2A) et l'organisation de la rétrocession dans les établissements de soins remet en cause cette liberté de prix pour les produits dits innovants et coûteux non pris en charge par la T2A et les produits rétrocédés. Les modalités de déclaration de prix de ces deux catégories de médicaments ont été définies dans un accord-cadre hôpital signé entre l'État et les entreprises du médicament le 30 mars 2004. Cette part représente approximativement 50% du marché hospitalier. Cet accord cadre a par ailleurs fait l'objet d'un avenant signé le 19 juin 2006. Les entreprises doivent déclarer au CEPS le prix qu'elles prévoient de pratiquer.