A. Le droit à l'information et le consentement du patient
L'exigence du consentement se retrouve notamment aux articles 16-3 al. 2, du Code civil qui dispose : "le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement..." à l'intervention thérapeutique, ainsi qu'à l'article L. 1111-4 du CSP. De plus, le Conseil Constitutionnel, dans sa décision du 24 juillet 1994, lie le principe d'assentiment à celui de dignité de la personne en en faisant un principe de valeur constitutionnelle, renforçant davantage son poids dans la relation de soin.
Le principe est celui d'un consentement libre et éclairé qui était déjà contenu dans l'arrêt Mercier de 1936 et qui s'inscrit pleinement dans le principe de la démocratie sanitaire inhérente à la loi du 4 mars 2002 comme l'expose l'article L. 1111-4 du CSP : "toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu'il lui fournit, les décisions concernant sa santé".
Le même article précise ensuite que "ce consentement peut être retiré à tout moment". Cette précision est d'importance puisque le patient consent à l'acte de soin et non pas à tous les actes et ce même lorsque le patient est hospitalisé. Bien que l'individu consente à son admission au sein d'un établissement de santé, son consentement doit être recherché à chaque acte (prise de sang, IRM, scanner). Sortant du paternalisme médical consistant à laisser le professionnel de santé seul décideur, les dispositions actuelles conduisent à redonner au patient le libre choix en imposant au médecin de l'informer systématiquement.
Le consentement doit être libre, ce qui signifie qu'il appartient au professionnel de santé de vérifier que celui-ci n'a pas été donné sous l'emprise de la contrainte mais exprimé par une personne en état de consentir. Il s'agit non seulement d'un consentement positif à l'acte de soins, mais aussi d'un consentement négatif, c'est à dire un refus du soin. Dans ce dernier cas, le professionnel de santé doit "respecter la volonté de la personne après l'avoir informée des conséquences de ses choix".
Il convient de préciser que le médecin ne commet pas ici l'infraction d'omission de porter secours à une personne en péril visée à l'article 223-6 Code pénal par le simple fait qu'il laisse partir un patient ; il faudrait pour cela que le patient soit en état de péril vital imminent, ce qui ne l'est pas le cas dans la très grande majorité des situations.
Cependant, le droit français ne fait pas du consentement, contrairement au droit anglo-saxon, la seule clef de voute de l'intervention médicale puisqu'on retrouve ici l'exception de l'urgence qui permet d'agir sans le consentement du patient. En effet, bien que ce dernier soit libre de refuser les soins, le professionnel de santé peut se retrouver face à un conflit de valeur lorsque le patient est en état de péril vital imminent : faire droit à sa volonté et le laisser mourir ou décider d'agir contre sa volonté. Entre le respect de la volonté de l'individu et la vie de celui-ci, le droit a tranché en faveur du second comme le rappelle la jurisprudence sur les personnes Témoins de Jéhovah et le refus de transfusion sanguine (Ordonnance du Conseil d'État, 16 août 2002 CHU de Saint-Etienne, n°249552 : http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http://www.conseil-etat.fr/ce/jurispd/index_ac_ld0228.shtml&title=Ordonnance)
Le consentement doit également être éclairé. Cela avait été mis en exergue par l'arrêt Mercier de 1936 et se retrouve aujourd'hui à l'article L. 1111-2 CSP qui précise : "toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé". Cette notion de consentement éclairé renvoie à l'obligation d'information du professionnel de santé à l'égard de son patient.
Le professionnel de santé doit délivrer une information claire, simple et appropriée. Cela permet d'écarter tout formulaire préétabli par les médecins puisque l'information doit être appropriée à chaque patient. Le professionnel de santé doit alors s'assurer de la bonne compréhension par le patient de l'information.
Par principe, le consentement est oral et il est erroné de croire que l'écrit est nécessaire. Seuls quelques cas spécifiques requièrent un écrit du patient comme par exemple en matière de chirurgie esthétique, d'aide médicale à la procréation ou encore de recherche biomédicale.
Le devoir d'information "trouve son fondement dans l'exigence du respect constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine" (Première chambre civile de la Cour de Cassation, 9 octobre 2001), lui conférant par conséquent valeur constitutionnelle. Sans cette information, le patient ne peut pas émettre un consentement éclairé.
L'information est due par le prescripteur, à savoir le médecin, mais aussi par celui qui réalise l'acte en cas de rôle sur prescription comme pour l'infirmier ou encore le pharmacien pour la délivrance des produits. Ainsi, lorsqu'un médecin prescrit une prise de sang, il doit informer le patient sur l'acte (pourquoi, dans quel but, etc.), puis l'infirmier qui réalise l'acte doit également l'informer (et recueillir son consentement) sur la réalisation de l'acte. Ainsi, il est possible de constater que les deux informations ne se juxtaposent pas mais se complètent.
Le premier destinataire de l'information est bien entendu le patient lui même au cours d'un entretien individuel (art. L. 1111-2 al. 3 CSP et même si celui-ci est mineur ou incapable majeur (art. L. 1111-2 al. 5 CSP). Dans ce cas, l'information sera également donnée à leur représentant légal. La loi du 4 mars 2002 innove même en permettant à une personne majeure de désigner une personne de confiance, laquelle sera consultée et destinataire de l'information si le patient est hors d'état de la recevoir (art. L. 1111-6 CSP).
L'information porte sur le coût de l'acte médical ainsi que sur son remboursement par les régimes obligatoires d'assurance maladie. L'information du patient porte aussi sur les risques encourus, ce qui est un préalable nécessaire à toute décision de mettre en œuvre les soins. Elle porte également sur "les différentes investigations, traitements et actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus" comme le rappelle l'article L. 1111-2 al. 1er CSP. L'information concerne donc tous les risques, graves ou pas, qui se réalisent fréquemment, ainsi que les risques qui emportent de graves conséquences dommageables lorsqu'ils sont seulement "normalement prévisibles" et non pas fréquent.
Le professionnel doit les informations non seulement au jour de l'acte mais également après si "postérieurement [...] des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver" comme l'indique l'article L. 1111-2 al. 1er in fine du CSP.
La loi et la jurisprudence ne demandent pas une démonstration scientifique de la part du professionnel, bien au contraire. L'information doit être simple, intelligible, loyale et appropriée au patient, ce qui permet d'écarter tout formulaire préétabli par les médecins puisque le même document est généralement délivré à tous les patients, quel que soit leur âge, leurs antécédents médicaux ou leurs capacités intellectuelles. Bien que cet écrit rassure les professionnels sur le terrain probatoire comme trace de l'information donnée et du consentement reçu, la valeur juridique intrinsèque du document est discutable s'il n'est pas accompagné d'informations supplémentaires individualisées puisque le médecin doit alors s'assurer de la bonne compréhension par le patient des informations reçues.
Néanmoins, informer n'est pas convaincre. Le professionnel de santé n'est pas tenu de réussir à convaincre son patient du danger de l'acte médical qu'il demande. Ainsi, lorsque deux modes opératoires sont possibles, il ne saurait être reproché au médecin, ayant correctement informé le patient, de n'être pas parvenu à convaincre ce dernier de choisir celui qui présentait les moindres risques.
Ce devoir d'information n'est pas absolu et certaines exceptions existent. Tel est le cas en matière d'urgence vitale et d'impossibilité d'informer le patient ou encore lorsque le patient veut être tenu dans l'ignorance. Le droit à l'information, c'est aussi le droit de ne pas savoir, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission, et ce pour des considérations de santé publique.